Chrétiens et musulmans, partenaires actifs dans les sociétés européennes

Bruxelles-Malines Mardi 21 octobre 2008

Mesdames, Messieurs,

Je suis très heureux de participer avec vous à cette Conférence européenne christiano-musulmane. Le thème retenu et les points abordés me paraissent d’une grande actualité, que ce soit la place des religions en Europe, leur inscription dans la société civile, les relations de ces religions entre elles, l’apport du dialogue interreligieux et du partenariat actif des religions au sein des sociétés européennes.

Je suis cependant quelque peu inquiet devant l’amplitude du thème, tant les situations en Europe sont diverses, les statuts des religions différents, et les relations entre les croyants des grandes religions contrastées. La réflexion devient particulièrement complexe si on intègre dans notre analyse des pays ou des régions d’Europe comme la Bosnie-Herzégovine ou le Kosovo, qui ne font pas encore partie de l’Union européenne.

Mon ambition, ce matin, n’est pas de vous faire un rapport exhaustif sur la situation européenne mais de dégager quelques points de réflexion susceptibles de nourrir un échange entre nous. Vous ne vous étonnerez pas que je fasse parfois plus référence à l’Eglise catholique à laquelle j’appartiens et à la situation française qui m’est davantage familière.

Télécharger le document au format acrobat

I – Les caractéristiques des sociétés européennes

Être citoyen d’Europe et homme de foi se vit aujourd’hui au sein des sociétés européennes dans un contexte particulier. Celui-ci me paraît marqué par trois facteurs :

1) Le pluralisme religieux

Nous sommes dans des sociétés qui voient une cohabitation d’Eglises diverses (protestantes, catholique, orthodoxes, anglicane, présence d’Eglises orientales en diaspora..) mais aussi de religions diverses : christianisme, islam, judaïsme, bouddhisme, religions d’Extrême Orient, religions traditionnelles africaines. Chaque grande religion a quitté l’aire géographique qui l’a vue naître et est devenue mondiale. La mobilité, les migrations, la mondialisation de la communication médiatique ont contribué fortement à cette mondialisation des religions. Cela amène chaque religion à se situer par rapport aux autres et parfois, si telle religion est majoritaire (en nombre ou en impact historique) à s’ajuster avec d’autres religions minoritaires. La question qui se pose pour beaucoup : comment vont vivre ces religions entre elles dans le même espace national ? Dans le même espace européen ? Vont-elles contribuer à la paix et à l’entente sociale ou au contraire vont-elles alimenter des foyers d’intolérance et d’absolutisation des conflits ?

L’Islam aujourd’hui est très implanté dans la plupart des pays européens. Il a apporté au cours de l’histoire sa contribution à la société européenne (cf. en Espagne, en Andalousie.) Son enracinement est ancien dans certains pays européens (Bosnie-Herzégovine, Albanie…). Chez d’autres, il est plus récent car lié à des migrations du siècle dernier. Cette présence s’accompagne de toute une mémoire historique qu’il faudra gérer, guérir, ou en tout cas revisiter : mémoire des invasions arabes, barbaresques et turques (La victoire de Lépante ou l’arrêt des turcs près de Vienne), mais aussi mémoire des colonisés et des colonisateurs (en particulier pour tous ceux qui viennent des pays du Maghreb ou de l’Afrique noire)

2) La neutralité religieuse et philosophique de l’Etat

Je sais bien qu’il y a en Europe des pays où l’Etat se reconnaît officiellement lié à une Eglise (Eglise anglicane en Grande-Bretagne, Eglise catholique à Monaco, Eglise luthérienne en Norvège..) Mais, de plus en plus, les Etats en Europe – et la tendance se renforce- se veulent neutres confessionnellement. Ils ne veulent pas imposer les vues d’une Eglise, d’une religion ou d’une philosophie. Ils s’interdisent toute ingérence dans la vie des cultes et demandent aux cultes de respecter l’autonomie du domaine qui est le leur. Cela devrait normalement éviter toute instrumentalisation de la religion par l’Etat. Cette neutralité de l’Etat s’accompagne la plupart du temps d’un désir de traiter les Eglises ou les religions sur un pied d’égalité. Toutes ont à ses yeux les mêmes droits et les mêmes devoirs.

On a pu parler aussi de laïcité de l’Etat, mais ce mot, difficile à traduire dans un certain nombre de langues européennes, me paraît plutôt délicat à manier et je ne l’emploierai que rarement ici.
Par contre, je parlerai de neutralité bienveillante ou de neutralité hostile.

La neutralité bienveillante est celle d’un Etat qui prend en compte comme une composante importante de la vie en société la dimension sociale des religions. Cet Etat entretient des liens avec chacune d’entre elles et veille à ce que la liberté religieuse et tout particulièrement la liberté de culte soient effectives pour toutes. Je signale à ce propos qu’une telle prise en compte des religions par l’Etat est facilitée par la clarté de la représentativité de chaque religion. Il faut à l’Etat des interlocuteurs qui représentent « leur culte » et soient habilités à parler en son nom. Il vaut mieux d’ailleurs que ce culte se donne à lui-même son propre organisme représentatif plutôt que de se le laisser imposer par l’Etat. Car la tentation peut être forte pour celui-ci d’instrumentaliser l’instance mise en place par lui.

Les Eglises et les religions pourront avoir un statut de droit public, de culte reconnu, de culte reconnu dans le cadre d’un concordat. D’autres seront de droit privé, non reconnu officiellement, mais un patrimoine immobilier cultuel leur sera affecté ou bien la présence d’aumôneries dans des lieux publics (lycées, hôpitaux, prisons, armée) leur sera autorisée (en France).

La neutralité hostile sera celle d’un Etat qui ne veut pas connaître les religions (celles-ci entrent alors dans le domaine commun des associations) et ne reconnaît que des « citoyens ». On pense dans cette perspective que l’unité d’une nation ne peut se faire que si l’on demande à chaque individu de séparer en lui appartenance citoyenne et appartenance religieuse.

La plupart des Etats veulent avoir des relations aux Eglises et aux religions, mais il nous faut remarquer que la sécularisation qui marque nos sociétés européennes pousse de plus en plus à la privatisation des religions, à leur effacement social et à la grande discrétion dans leurs manifestations publiques. Les religions risquent ainsi d’être enfermées dans le pur domaine des convictions intimes des individus. D’autant plus que l’individualisme qui marque notre société occidentale renforce ce phénomène.

3) le fonctionnement démocratique

La plupart des régimes européens sont des régimes démocratiques. Cela veut dire que les lois de l’Etat sont votées par une représentation populaire désignée à partir d’élections libres et transparentes. Ces lois sont encadrées par une constitution et par la reconnaissance de l’autorité fondatrice des droits de l’homme. Dans les divers pays démocratiques européens s’opère une distinction entre lois religieuses et lois civiles. En effet, dans une société pluraliste, une religion ne doit pas vouloir imposer sa propre loi religieuse à l’Etat ou à l’ensemble de la société (cf. pour des catholiques, les différences entre le Droit civil et le Droit canonique). Parfois, les droits du croyant ou du citoyen sont volontairement limités par l’Etat ou par la législation du pays (cf. l’interdiction pour des prêtres d’enseigner dans les établissements scolaires publics du premier et du second degré, en France) Entre l’Etat et l’Eglise catholique en France, un accord a été trouvé, de fait, sur beaucoup de questions touchant l’observance de prescriptions religieuses dans la vie civile. Il s’agit d’accords empiriques. Sur certains points, il y a eu acceptation (par exemple, le statut d’ « association diocésaine » au lieu d’association cultuelle), sur d’autres refus (obligation du mariage civil avant la célébration du mariage religieux). Notons que si les lois de séparation des Eglises et de l’Etat ont été ressenties durement par les catholiques comme une rupture unilatérale et une spoliation, toute la jurisprudence qui a suivi est allée dans le sens d’une facilitation de la liberté de culte. L’acte le plus significatif d’une démarche de ce type se trouve dans les accords Ceretti-Poincaré des années 1921-1923 sur le statut des Associations diocésaines (dont la structure hiérarchique a été reconnue comme ne s’opposant pas à la loi de Séparation).

Je crois qu’il y a dans cette inscription sociale des religions un inévitable empirisme qu’il faut accepter.

Je note à ce propos que l’inscription de l’Eglise catholique dans ces données nouvelles marquées au coin par la modernité, n’a pas été toujours facile en France et qu’il lui a fallu du temps pour s’effectuer. En effet, il a fallu près d’un siècle pour que l’Eglise catholique se trouve relativement bien dans un régime de séparation aménagée. (Statut du patrimoine immobilier des églises et des cathédrales, reconnaissance d’aumôneries, création d’une instance de dialogue Eglise catholique-Etat). Par contre, il y a un point qui reste bloqué, c’est celui des interdictions de toute subvention publique à un organisme cultuel ou à une manifestation cultuelle.

Je voudrais malgré tout souligner que cet ajustement de l’Eglise catholique à la société moderne marquée par la neutralité de l’Etat n’a pas résulté d’une simple capacité d’adaptation mais s’est accompagné d’un travail de réflexion théologique fondamental qui a abouti à l’enseignement du Concile Vatican II. Je pense, en particulier, au Décret sur la Liberté religieuse et au passage de la Constitution Gaudium et Spes sur l’autonomie respective de l’Eglise et de l’Etat (n° 76). Je ne crois pas que les croyants des autres religions puissent s’insérer dans les sociétés européennes sans faire à leur tour un travail analogue, sans revisiter leurs sources, l’accès à ces sources et toute leur tradition.

II – Chrétiens et musulmans, partenaires actifs

Chrétiens et musulmans sont appelés à devenir de plus en plus des partenaires actifs dans les sociétés européennes. Dans quels domaines ?

1) Dans la défense de la liberté religieuse et de la liberté de conscience

Il est dans la nature de l’homme de chercher la vérité, de s’ouvrir à une transcendance. Cette recherche ou cette ouverture ne peuvent être que libres. Cela implique aussi la liberté de croire, d’exprimer sa foi, de la célébrer, de l’enseigner et de la manifester. Dans le cadre du respect de l’ordre public, l’Etat doit, non seulement ne pas mettre d’entrave à cette liberté, mais veiller à ce que tous puissent exercer ce droit à la liberté religieuse. Rappelons que la liberté religieuse a une dimension sociale. Elle implique une vraie liberté de culte (construction de mosquées, liberté d’association et d’organisation interne, gestion de leurs propres ministres, enseignement, activités caritatives ou de solidarité, choix donné aux familles concernant l’enseignement de leurs enfants…) Les chrétiens ont besoin de souligner tout cela devant des opinions publiques qui ne sont pas acquises à cette façon de voir.
Cette liberté religieuse implique le respect de la liberté de conscience : possibilité d’adhérer librement à une religion ou de la quitter. C’est une question sensible dans l’Islam pour bon nombre de musulmans. Mais je crois qu’une pleine intégration dans les sociétés européennes implique cette liberté. Respecter la liberté de conscience de celui qui quitte sa religion n’implique pourtant pas qu’on approuve le choix qui a été fait par lui.

2) Dans le refus de l’exclusion

Un des dangers pour l’insertion des musulmans en Europe, c’est la situation dans laquelle se trouvent un certain nombre d’immigrés, de familles issues de l’immigration ou de jeunes de la 2° ou de la 3° génération : constitution de cités ou de quartiers ghettos, échec scolaire, chômage, sentiment de ne pas avoir de place ni d’avenir dans la société, rancœur et violence vis-à-vis de cette société qui ne semble pas si juste que cela et d’un Etat policier qui ne paraît lui non plus pas si « neutre » que cela. L’Islam pourra paraître alors comme celui qui donne à ces jeunes une identité et une fierté que la société ne leur donne pas. Ce sont les courants les plus conservateurs ou les plus anti-occidentaux qui risquent d’être choisis et les communautés musulmanes peuvent être tentées de se constituer en contre-société. On s’enferme alors, de façon quasi schizophrénique, dans des représentations religieuses d’une cité musulmane idéale à mille lieues du réel et de ses potentialités. Ce qui peut amener des phénomènes de rejet radical de l’Occident dans les populations musulmanes et un rejet analogue des musulmans dans les populations européennes non-musulmanes. Il y a tout un travail à faire en partenariat (y compris avec d’autres acteurs sociaux et avec des politiques) pour prévenir les explosions qui peuvent se produire dans ces situations génératrices de violence et pour faire sortir de ces situations d’exclusion.

3) Dans la promotion d’un vrai service de l’homme

– Dans des sociétés en voie de sécularisation de plus en plus rapide, qui risquent de rejeter toute transcendance, chrétiens et musulmans, croyants et citoyens doivent témoigner ensemble que l’homme ne vit pas seulement que de pain et qu’il ne se réduit pas à un être de pure consommation. Ils témoignent que l’homme ne se trouve vraiment lui-même que dans une relation à un autre, Dieu, un Dieu qui se révèle à lui et veut entrer en relation avec lui. Cela touche, non seulement la foi personnelle, mais aussi l’expression sociale de cette foi (Cela renvoie à ce que j’ai dit plus sur la défense de la liberté religieuse et de la liberté de culte).

– Chrétiens et musulmans peuvent se retrouver pour défendre ensemble un certain nombre de valeurs humanistes : l’importance donnée à la famille, le respect de la dignité de l’homme dans toutes les situations de sa vie, la justice sociale, l’attention à l’environnement et à un développement durable, le refus d’une gestion purement sécuritaire des phénomènes migratoires, l’éducation, la paix sociale et la paix dans le monde. Face à un affaiblissement des repères éthiques en Occident, chrétiens et musulmans ont aussi des choses à dire. Je voudrais relever enfin tout le travail de pacification sociale, d’entraide mutuelle, qui peut se faire dans des cités ou des quartiers, dits parfois difficiles, quand des croyants des différentes religions, avec des hommes de bonne volonté, se mettent ensemble et collaborent pour relever le défi du vivre ensemble.

4) Dans le dialogue des cultures

Dans une société pluraliste où se côtoient diverses cultures, des groupes divers ayant eu un passé conflictuel entre eux ou ayant aujourd’hui des intérêts divergents, la question qui se pose est celle du lien social. Comment habiter ensemble le même pays, la même Europe ? On a besoin pour cela de compréhension, de dialogue, de découvertes des différentes cultures, de guérison des mémoires, d’estime mutuelle ou de combats menés ensemble contre toute forme d’exclusion ou d’expression de racisme. Cela appelle œcuménisme et dialogue, dialogue culturel ou interreligieux.

Ce dialogue entre croyants peut prendre des formes différentes :
– dialogue dans la vie quotidienne avec ses multiples occasions d’échanges et de rencontres.
– dialogue social ou dialogue sur des questions de société (sur les problèmes posés par une intégration dans des pays européens, dans ce qui est appelé aussi : « l’Occident »).
– dialogue de croyants sur leur expérience spirituelle (la prière, la lecture d’un texte sacré, la communauté, la solidarité appelée par la foi…)
– dialogue proprement théologique au niveau de nos représentations religieuses et de leur conceptualisation.

Je crois que ce dialogue est très important dans nos différents pays. Mais il l’est encore plus pour la vocation et la mission de l’Europe.
En effet, l’enjeu de l’aventure de l’union des peuples d’Europe n’est pas que commercial ou économique. Il est au service des hommes et de la paix dans le monde. La réconciliation entre les peuples d’Europe, après trois guerres terribles, dont deux mondiales, vient nous dire qu’en aucun cas la guerre est la bonne voie pour résoudre les conflits, que la fatalité de conflits ancestraux peut être combattue et que la réconciliation entre les peuples est possible. L’Europe ne peut vraiment en témoigner que si elle-même montre sur son territoire que la paix et la réconciliation sont à l’œuvre. Les Eglises et les religions qui, dans cette Europe-même, ont été source de conflits ou de violence au cours de l’histoire, doivent elles aussi montrer qu’elles sont aujourd’hui des facteurs, de rapprochement, de compréhension mutuelle, de dialogue et de paix. Elles doivent préciser aussi à quelles conditions un tel changement de relations entre croyants est aujourd’hui possible. Mission de l’Europe, œcuménisme, dialogue interculturel et dialogue interreligieux sont donc beaucoup plus liés qu’on ne croit. Sur cet horizon européen, le partenariat chrétiens-musulmans, mais aussi le partenariat musulmans-chrétiens-juifs, s’avère plus nécessaire que jamais.

5) Dans la promotion mondiale de ces valeurs humanistes

L’intégration des communautés religieuses en Europe est avant tout une affaire de confiance. Peut-on faire crédit aux discours des religions en situation minoritaire ? La réponse est sans hésiter affirmative si ce sont les mêmes discours qui sont tenus, les mêmes droits promus, quand elles sont en situation majoritaires. Si ce n’est pas le cas, la réponse sera plus réservée. On doutera de leur sincérité et de leur conversion à la pratique démocratique.

L’arrestation d’une femme portant dans son cabas quelques bibles peut faire douter de la pleine liberté de religion et de la pleine liberté de culte en Algérie. La difficulté pour des chrétiens (philippins par exemple) en Arabie saoudite de pratiquer leur religion n’est pas sans poser question…Le 24 septembre dernier, le patriarche Bartholomée confiait : « A Constantinople, nous sommes une très petite minorité chrétienne, et en tant que citoyens turcs, nous remplissons entièrement nos obligations envers l’Etat. Seulement nous ne sommes pas systématiquement traités comme la majorité musulmane. Nous avons l’impression d’être une classe inférieure de citoyens, ce qui est particulièrement difficile à vivre ».

On a parfois parlé de besoin de réciprocité. Je ne sais pas si le terme est tout à fait adéquat. Mais on voit bien ce qui est derrière, ce qui est en jeu : à savoir, la crédibilité du discours tenu. Car, on ne peut revendiquer la pleine liberté religieuse ici et la restreindre là-bas. D’autant plus, que nous sommes dans un contexte où l’antisémitisme et l’islamophobie sont encore très présents. Sur ce point, la mondialisation opérée par les médias a un effet immédiat sur les esprits. Ce qu’on voit vivre là-bas va conditionner ce qu’on est appelé à vivre chez soi. Je sais bien que les choses sont très complexes sur les plans politiques et culturels. Il ne faut pas confondre islam et pratiques étatiques. Et il est évident qu’on ne peut pas forcément attendre un changement de comportement et des représentations des états et des peuples du jour au lendemain. Mais on a besoin de sentir qu’il y a un vrai partenariat entre musulmans et catholiques en Europe pour promouvoir mondialement quelques-unes de ces valeurs humanistes qui nous paraissent fondamentales. Il ne s’agit pas ici de redonner vie à un eurocentrisme mais de témoigner ensemble du fondement transcendant de ces valeurs.

Claude GEFFRE, s’adressant au Groupe de Recherches Islamo-chrétien, à Rabat, le 25 avril dernier, disait justement sur ce point: « Le fondement immédiat des droits de l’homme, c’est un certain consensus sur la dignité inviolable de la personne humaine. Mais la violation permanente des droits de l’homme tendrait à démontrer qu’il faut faire appel à un fondement plus radical. L’expérience du cruel XXème siècle qui vient de s’achever nous invite à méditer sur la fragilité de la conscience humaine laissée à elle-même. Le fondement radical de la dignité de la personne humaine est posé avec la révélation biblique sur la création de l’homme à l’image de Dieu. C’est là un héritage commun à la Bible et au Coran. C’est parce que l’homme est créé à l’image de Dieu que la vie de tout être humain, aussi quelconque soit-il, revêt un prix sacré. Ainsi, même si le christianisme et l’Islam n’ont pas la prétention de présenter une alternative sociale et politique, leur contribution à la construction d’une Europe plus fidèle à sa vocation propre est d’une importance décisive. Face à une culture dominante qui risque d’abîmer l’homme, elles peuvent exercer un rôle de contre-culture. Et plus généralement, elles ont vocation pour adresser à l’ensemble de la communauté internationale un avertissement prophétique alors que nous sommes toujours confrontés aux injustices structurelles d’un monde qui obéit à la seule loi du profit. »

Puisse cette conférence européenne, qui vient dans le prolongement de plusieurs autres, contribuer à renforcer cette conviction de l’absolue nécessité de ce partenariat musulmans-chrétiens en Europe !

Cardinal Jean-Pierre RICARD

Archevêque de Bordeaux
Vice-Président des Conférences
Episcopales d’Europe

à consulter sur le sujet

DSE doctrine sociale