A Bordeaux, un rassemblement priant et « décoiffant » sur le service du frère
Dans l’esprit de la démarche Diaconia2013 « Servons la Fraternité », un rassemblement organisé par le Conseil diocésain de la Solidarité a fait dialoguer et prier à la cathédrale de Bordeaux le 9 octobre 300 personnes autour du thème « Qu’as-tu fait de ton frère ? N’oublions personne », dans le cadre de l’Année de la Miséricorde. Par Chantal Joly
« Nous avons travaillé avec les premiers intéressés, sans prendre la parole à leur place mais en les écoutant. Il y a eu des choses très poignantes. Réfléchir ainsi sur le fait d’être miséricordieux nous a amenés sur des terrains quotidiens souvent masqués », raconte Patrice Vincey. Délégué diocésain à la Pastorale des Migrants, il a fait partie de la petite équipe de préparation du rassemblement qui comprenait son prédécesseur, le Père Francis Bacqueyrisses, animateur du Conseil diocésain de la Solidarité, Alain de Brugière, président du Secours Catholique, le Père Paul Roussy, curé en centre-ville de Bordeaux proche des personnes de la rue, et surtout deux personnes ayant connu la galère : Gilles , qui a aujourd’hui un toit et du travail et Cathy, une jeune fille qui travaille au 115.
Après le mot d’ouverture du Cardinal Ricard et la méditation du père Roussy « Le Fils de l’Homme n’a pas où reposer sa tête », ces deux personnes ont, du reste, livré leur témoignage. Tout comme Léonard, un ami Rom venu par Médecins du Monde qui réussit, lui aussi, à émerger socialement ; un bénévole du Chalet Bleu, une structure d’accueil des familles de détenus du centre pénitentiaire de Gradignan ainsi que le président du réseau Welcome* Bordeaux. « Le premier témoignage, celui de Gilles, était décoiffant car il nous a interpellés sur le fait qu’une majorité des personnes entrées dans la cathédrale n’ont pas regardé l’homme qui mendiait à la porte, or ne pas le considérer comme un être humain pose davantage question que de ne pas lui donner de l’argent », raconte Patrice Vincey.
Rencontre entre paroissiens et plus démunis
Dans la foulée, le temps d’un échange approfondi a été pris par groupes de six, appuyé sur la lecture de la Parabole du Bon Samaritain et articulé autour de questions telles que : comment cela rejoint ma propre expérience ? Quels sont les laissés pour compte ? En quoi la Parabole m’engage ? etc. Puis un théologien laïc, Jean-Claude Caillaux, a creusé la question du service du Frère et rappelé cette parole forte du Pape François le 6 juillet dernier à Rome, devant des pèlerins du monde de la rue : « Nous voudrions rappeler à l’Eglise de France que Jésus souffre à la porte de nos églises où les pauvres sont absents de nos célébrations ». Un temps de prière autour du psaume 33 entrecoupé des contributions des participants notées sur des post-it, a conclu l’après-midi.
Le Père Baqueyrisses se réjouit que dans l’assemblée figuraient non seulement des acteurs de solidarité mais également des paroissiens hors mouvements caritatifs et un certain nombre de personnes en situation de handicap ou de précarité. C’est l’un des fruits de Diaconia, commente le Père Bacqueyrisses, « dans un certain nombre de paroisses, l’instauration de tables ouvertes permet la rencontre entre paroissiens et personnes démunies, allant jusqu’à un échange spirituel ». Il souligne aussi que « la prise en compte des paroles des plus démunis a progressé dans les mouvements. »
Ni exclusion, ni indifférence
Extrait de l’homélie de Laurent Dognin évêque de Quimper et Léon pour la fête diocésaine de la Miséricorde et de la Fraternité du 8 octobre.
« C’est le sens de la Fraternité que nous devons vivre comme chrétien à la suite du Christ. Nous ne pouvons pas nous satisfaire que les autres restent à l’écart, ni être indifférents au sort de nos frères. En cette fête diocésaine de la Miséricorde et de la Fraternité, nous avons voulu vivre concrètement cette communion retrouvée par des personnes qui pouvaient se sentir à l’écart, voire rejetées, mais qui ont fait l’expérience de la Miséricorde du Seigneur, et qui ont retrouvé le chemin de la foi, ainsi que le chemin de la communauté chrétienne. Cette fraternité est à rechercher sans cesse au sein de nos communautés paroissiales où le Christ nous appelle à donner à chacun sa place, sans exclure personne ».
*Réseau jésuite d’hospitalité des demandeurs d’asile