Armand, la pastorale du témoignage

Armand Bienvenu Ngana AbomoÀ 46 ans, Armand Bienvenu Ngana Abomo s’épanouit dans sa mission d’animateur pastoral à l’ensemble scolaire et professionnel Saint-Philippe-Apprentis d’Auteuil à Meudon. Par Chantal Joly

Si sa rentrée pastorale officielle coïncide, le 1er octobre, avec la fête de Sainte Thérèse de Lisieux, protectrice de la Fondation Apprentis d’Auteuil, voilà plusieurs semaines déjà qu’Armand est sur le pont. Avec l’avantage d’en être à sa quatrième année d’expérience et d’être devenu un familier d’une majorité de jeunes de l’établissement. Les poignées de mains font intégralement partie de la pastorale. « Ici, explique-t-il, c’est la règle du tutoiement. C’est une communauté et qui dit communauté dit esprit de famille ». Une notion naturellement chère à celui qui a été responsable national de l’ACE (Action Catholique des Enfants) et directeur d’une structure au service des enfants de la rue au Cameroun. « J’ai toujours eu un certain attachement vis à vis des enfants en difficulté » confie Armand. Mis à part le fait d’avoir décroché une thèse en droit canon à l’Institut catholique de Paris, rien ne l’orientait pourtant, au départ, vers le poste qu’il occupe aujourd’hui. Armand était éducateur spécialisé depuis trois ans à Saint-Philippe lorsqu’il a été recruté.

Vivre l’Évangile et oser dire Dieu

À la fois adjoint en pastorale scolaire du directeur (selon la terminologie de l’enseignement catholique) et animateur en pastorale (selon les usages d’Apprentis d’Auteuil), La pastorale dans l’Ensemble scolaire et professionnel Saint-Philippe doit être fidèle à la fois aux orientations pastorales du diocèse de Nanterre et à la ligne pastorale d’Apprentis d’Auteuil enracinée dans son projet éducatif « Accueillir, Éduquer, Former et Insérer les plus fragiles ».  Son activité se décline donc selon deux axes. Le premier volet, c’est celui de « Vie chrétienne » : 2h d’enseignement catéchétique un jour par semaine avec les candidats à un sacrement, des retraites, des célébrations, l’Angelus le mercredi et des échanges avec la paroisse de Meudon. Et il y a tout le reste qu’il regroupe sous l’expression « Pastorale du témoignage ». C’est à dire « Apprendre à voir en l’autre le visage de Dieu. Dès lors, nous apprenons à  considérer qu’il a du prix à nos yeux, il est comme nous même maillon indispensable pour la société. Nous apprenons à le connaître, à connaître sa culture, nous apprenons à vivre, à observer, à réfléchir et à faire ensemble, à être des acteurs… Dans cette dynamique, nous nous découvrons capables, nous gagnons en confiance, nous pacifions nos relations. Enfin nous leur donnons du sens ; c’est parce que nous sommes chrétiens que nous agissons ». Il ajoute : C’est quoi évangéliser ? Dire l’Évangile, la bonne nouvelle qui nous a été annoncée mais d’abord la vivre, en être témoin, oser dire Dieu à travers nos actions ».

Concrètement cela passe chez Apprentis d’Auteuil par des « Ateliers de développement humain et spirituel » ; tout un parcours de débats autour de thèmes tels que « Choisir son avenir » ou « Tous frères, tous différents, tous égaux » afin d’ « habituer les jeunes à la discussion en se respectant et en analysant des situations à la lumière de la foi ». En cela sa formation à la pédagogie du Voir-Juger-Agir, (« Arrêt sur image » chez Apprentis d’Auteuil) a semblé à Armand tout à fait adaptée pour une population comprenant de nombreux musulmans, des jeunes d’Afrique sub-saharienne et des non pratiquants. La pastorale du témoignage est à la foi un outil éducatif et un acte missionnaire.

Sa mission passe aussi beaucoup par de la présence non formelle. C’est ainsi qu’entre le déjeuner et la reprise des cours, il se rend disponible pour tous les jeunes qui passent au Centre pastoral écouter de la musique, lire des revues ou regarder un film. Il faut, dit-il, « essayer de parler leur langage et les rejoindre là où ils sont, être pour eux « des adultes-ressource ».

Un projet solide porté par l’Esprit Saint

Une action de solidarité « entrecoupée de périodes d’évaluation » est également proposée aux Premières et aux Terminales du lycée professionnel : distribution de repas, vaisselle et jeux de société partagés avec des personnes en errance sur une péniche de l’Ordre de Malte. Une expérience très positive pour « des jeunes en décrochage scolaire qui ne se font pas toujours confiance ». L’un d’eux a même donné des cours de Français à un migrant. « Ici ce ne sont pas des anges mais ce sont des jeunes bien », commente Armand. Les « petites joies de tous les jours » font que ce croyant constamment « bousculé par Dieu » se sent bien dans son poste, concentré désormais sur les jeunes plutôt que sur une carrière à mener. Armand tient à souligner que les fruits de son travail sont « la conjonction des efforts de tous dans l’établissement, un lieu enraciné sur un projet solide avec l’Esprit Saint qui souffle derrière ».

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