Soins palliatifs : être soulagé et être écouté

A Paris, la Maison Jeanne Garnier est reconnue en Europe comme un des pôles de compétence en matière de soins, d’accompagnement et de formation en soins palliatifs. Entretien daté de 2011 avec Daniel d’Hérouville, Médecin-Chef, et Cédric Boutonnet, Directeur des établissements. Par Patrick de Sagazan.

« Il faut sortir de l’idée que la seule façon de mourir dans la dignité serait de mourir en étant « euthanasié ». La dignité est inhérente à la nature humaine. Avec les soins palliatifs, nous faisons tout ce qui est possible pour soulager la douleur du malade en l’accompagnant dans ses questions psychologiques, sociales et spirituelles. Le fait de lui apporter un soulagement lui permet de vivre sa vie jusqu’au bout » souligne Daniel d’Hérouville, médecin chef de la Maison Médicale Jeanne Garnier.

Fondée à Paris en 1874, par les Dames du Calvaire, pour accueillir et accompagner les femmes « incurables », la Maison Médicale Jeanne Garnier adhère au plan d’hospitalisation du Ministère de la Santé publique en 1971. Totalement rénovée en 1996, cette unité de soins palliatifs est reconnue en Europe comme un des pôles de compétence en matière de soins, d’accompagnement et de formation en soins palliatifs.

Votée le 9 juin 1999, à l’unanimité des deux chambres, la loi consacrée à ces soins stipule que « Toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement ». Elle précise : « Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire, en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage. »

Les familles doivent se sentir chez elles

Les unités de soins palliatives (USP) mettent ainsi tout en œuvre pour que les familles se sentent chez elles dans l’établissement. « Elles peuvent y circuler et y être hébergées jour et nuit » souligne Cédric Boutonnet, Directeur de Jeanne Garnier. Une anecdote rapportée par son directeur traduit bien l’atmosphère que chacun essaie de créer dans l’établissement : un patient avait confié à une infirmière qu’il avait eu le projet un an auparavant de partir en vacances pour skier. Le lendemain, sa chambre était transformée en piste de ski et chacun des membres de l’équipe soignante qui entrait avait revêtu l’équipement adéquat !

Dans la mesure où la personne est libérée du poids de la douleur, elle va pouvoir vivre autrement le processus naturel de la fin de vie, se poser des questions existentielles et spirituelles, avec l’accompagnement des soignants, de sa famille et de bénévoles qui ont reçu une formation s’étalant sur plusieurs mois. L’accompagnant bénévole est un tiers formé à l’écoute. Il représente l’ouverture du malade et de l’USP sur la société. « On continue à y vivre jusqu’au bout » souligne Cédric Boutonnet.

« Les soins palliatifs se sont beaucoup développés ces dernières années en France. Aujourd’hui, on voit une utilisation plus importante des traitements pour soulager les symptômes, davantage de démarches d’accompagnement, d’équipes soignantes qui s’impliquent dans cette dynamique » assure Daniel d’Hérouville, « mais il reste encore des situations difficiles, parce que tous les soignants n’ont pas fait encore la démarche de se former aux soins palliatifs ».

 

1000 personnes formées chaque année aux soins palliatifs

L’Observatoire National de la Fin de Vie, dans son état des lieux de 2011, souligne que « Jusqu’à la rentrée 2011, un seul module était obligatoire en deuxième cycle des études médicales comportant 2 à 20 heures d’enseignement selon les facultés ». La Maison médicale Jeanne Garnier a le souci de diffuser cette culture : chaque année quelque 1000 personnes y reçoivent une formation aux soins palliatifs.

Alors pourquoi un tel acharnement de la part de certains à vouloir faire voter une loi autorisant l’euthanasie ? « La revendication de ce droit est basée sur des sondages d’opinion dont les questions sont d’une telle ambiguïté que les réponses sont totalement orientées mais sont également basées sur l’évocation de situations douloureuses et particulières, pour lesquelles l’application de la loi Léonetti du 22 avril 2005, relative aux droits des malades et à la fin de vie, n’a pas été mise en œuvre. Ces sondages et campagnes travaillent sur l’émotion » analyse D. d’Hérouville.

« Au quotidien, précise-t-il, j’utilise des traitements sans hésiter et en respectant les bonnes pratiques même si, à certains moments je sais que je peux prendre le risque d’accélérer le processus vital. Je rejoins là la position que le pape Pie XII a exprimée dès les années 50, soulignant qu’il était du devoir des médecins de soulager la personne, même si à un moment, ils prenaient le risque de leur diminuer la vigilance voire d’abréger leur vie. Cette position de l’Église est de dire « ne laissons pas souffrir les personnes inutilement ».

Le respect de la vie humaine amène à marquer la double limite de l’acharnement thérapeutique et de l’euthanasie à l’égard de mourants qui vivent la dernière phase de leur vie.

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    Evangile de la Vie, lettre encyclique de Jean-Paul II, 1995, n.65