Visages et témoignages d’aumôniers au plus près des détenus

L’aumônerie catholique des prisons s’apprête à vivre son prochain congrès national à Lourdes (12-14 octobre 2018). En amont de cette rencontre, plusieurs aumôniers, prêtre ou laïcs, témoignent de leur mission au cœur d’un univers complexe.


P. Jean-François Penhouët, prêtre de la Mission de France, aumônier à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis.

« Il s’agit d’un ministère d’écoute sans jugement. Il implique d’être à l’écoute de l’autre tel qu’il est et d’être convaincu que dans toute vie humaine, il y a quelque chose de bien. Nous sommes envoyés au nom de l’Eglise pour manifester sa présence aux côtés des détenus dans le présent et l’avenir. Il est aussi important de proposer le Pardon tel que l’Eglise l’entend en ne le séparant pas de la responsabilité de l’acte et de ses conséquences. La justice humaine fait son travail ; au nom de notre foi et en dépit de la peine, nous croyons que le détenu a un avenir. »

Danièle Reppelin, aumônier dans le quartier des femmes de la maison d’arrêt de Lyon-Corbas

« Les femmes que je rencontre ont une puissance de vie extraordinaire qui peut se matérialiser positivement (arrangement de la cellule, un sourire, une attention) comme elle peut se retourner contre elles. Certaines se mutilent, se suicident. La violence verbale est aussi très présente par rapport à leur famille, aux délits des autres femmes. Plusieurs femmes ne souhaitaient pas être en présence d’une détenue condamnée pour infanticide lors des célébrations. Et puis un jour, après plusieurs discussions, la concernée est revenue. Certaines femmes ont parlé, regretté, évoqué un double jugement. Il est important pour celles-ci comme pour les aumôniers de se dire qu’il n’y a pas deux humanités, l’une plus pécheresse que l’autre. »

Francis Mortelecque, aumônier à la maison d’arrêt d’Amiens

 

« Je réponds à toute demande, mais il y a un tel désœuvrement en prison qu’il faut aussi être vigilant à ceux qui ne souhaitent pas me voir. Je suis là pour partager avec la personne, essayer de faire communauté. Je vais en prison, là où sont les détenus. Il m’est arrivé d’être trente minutes avec quelqu’un sans rien dire. Je rencontre souvent des détenus de confessions orthodoxe ou musulmane. Je parle peu de foi, j’y réponds quand on m’interroge. Je parle de tout avec les détenus, de jardinage, par exemple. Pour des personnes qui vivent à trois dans 9 m², rencontrer quelqu’un pour rien ne leur arrive jamais. Je suis un morceau de vie gratuit. »

François le Gouguec, aumônier à la maison d’arrêt de Belfort.

« Je fais face à des personnes isolées, beaucoup d’étrangers venus d’Europe de l’est. La beauté de cette mission réside dans la rencontre de deux personnes qui se regardent du mieux possible. Parfois il y a un mot mal dit ou un mot de trop ; on s’apprivoise l’un l’autre. Je ne suis pas là pour aider la personne mais pour la soutenir, la réconforter et apporter la Parole d’Evangile à celle qui le souhaite. Souvent, la relation des détenus avec l’Eglise est lointaine. La prison peut être propice à une réflexion sur soi. »

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