« Lumières de la Toussaint… » par Mgr Hippolyte Simon

Simon Hippolyte - Clermont

Réflexion de Mgr Hippolyte Simon, archevêque de Clermont, à l’occasion de la Toussaint 2010.
« Un vrai temps de Toussaint ! » Cette expression est devenue proverbiale en français. Pour nous, spontanément, dans notre culture, la Toussaint, est associée à un temps maussade et froid, annonciateur de l’hiver. Et il est vrai que nous fêtons assez souvent cette belle fête de tous les Saints sous un climat venteux et humide. Même les fleurs se mettent de la partie. En cette saison, les chrysanthèmes nous invitent à la nostalgie. Difficile, dans ces conditions, d’inviter les communautés chrétiennes à entrer dans la joie de la Jérusalem céleste !

Pour autant, il ne faudrait pas que la nature nous fasse passer à côté de la signification de l’une des plus belles fêtes de notre calendrier liturgique.

Une observation simple devrait déjà nous inviter à ne pas nous laisser dominer par ces impressions d’automne. L’Eglise est universelle. Nous venons de le voir avec le synode pour les Eglises du Moyen-Orient qui vient de se tenir à Rome ces dernières semaines. Et nous venons aussi de vivre la Semaine Missionnaire Mondiale qui nous invite à élargir notre horizon. En pensant à ces communautés lointaines, demandons-nous comment nos frères et nos sœurs de l’hémisphère sud peuvent se préparer à vivre la fête de tous les Saints : pour eux, elle n’est pas associée à la nostalgie de l’automne, mais aux promesses du printemps.

Un bref rappel historique peut aussi nous aider. L’Eglise catholique n’a pas toujours fêté la multitude des martyrs et des saints au début du mois de Novembre. A Rome, dans les premiers siècles, cette fête avait lieu au mois de Mai. Progressivement, ce sont les traditions celtes qui se sont imposées. Nos ancêtres païens avaient coutume de célébrer leurs morts au milieu de l’automne . Pour évangéliser ces pratiques, les communautés chrétiennes d’occident ont fait glisser la fête de tous les saints à cette même période. Puis au tournant du second millénaire, sous l’influence, entre autres, de Saint Odilon de Cluny, l’Eglise a fixé la prière pour les fidèles défunts au lendemain de la fête de tous les Saints. Et c’est ainsi que s’est établie pour nous cette proximité entre la fête des saints et la prière d’intercession pour les défunts de nos familles.

Laissons-nous éclairer par la Parole de Dieu

Il est légitime que l’évocation de ceux qui nous ont quittés éveille en nous des sentiments de tristesse. Il est légitime aussi que les gestes de fidélité que nous posons en allant nous recueillir près de leur tombe nous incitent à une méditation teintée de gravité. Mais ne restons pas enfermés dans nos sentiments. Laissons-nous éclairer par la Parole de Dieu. Au lieu de colorer la fête de tous les Saints par la tristesse que nous cause l’absence de nos disparus, éclairons cette absence à la lumière de l’Evangile. Accueillons la Promesse qui nous vient de la Jérusalem d’en haut, telle que nous la présente le livre de l’Apocalypse. Ainsi, notre regard et notre cœur pourront se convertir à l’Espérance. Sachons reconnaître que si nos disparus nous manquent, c’est qu’ils ont beaucoup compté pour nous. Mais nous ne pouvons pas les pleurer sans être invités à rendre grâces pour le bonheur de les avoir connus. Ainsi, notre méditation pourra nous faire entrer progressivement dans une meilleure compréhension de la Communion des Saints.

Alors, levons les yeux. Oublions le temps qu’il fait et laissons nous éclairer intérieurement par la Parole de Dieu. « Après quoi, voici qu’apparut à mes yeux une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, de toute nation, race, peuple et langue; debout devant le trône et devant l’Agneau, vêtus de robes blanches, des palmes à la main, ils crient d’une voix puissante: « Le salut à notre Dieu, qui siège sur le trône, ainsi qu’à l’Agneau! » (Apocalypse 7,9-10)

+ Hippolyte Simon
Archevêque de Clermont
25 octobre 2010

1- J’invite tous les lecteurs à prendre du temps pour aller s’informer sur les travaux de ce synode. Nous avons le devoir de communier à ce qui fait la vie, souvent difficile et parfois véritablement héroïque, de ces communautés dispersées. Certaines sont affrontées à la persécution et risquent de disparaître. Nous ne pouvons pas nous désintéresser de leur sort.
2 – Il reste un écho de ces pratiques païennes dans les rites d’Halloween. Mais on peut espérer que la société française sera assez lucide pour ne pas revenir à cette fascination pour la mort. Pas mêmes sous des formes plus ou moins folkloriques.

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