Les pardons bretons

Par Bénédicte Bouley

Sainte Anne d'Auray

De mai à octobre, tandis que les touristes envahissent les terres bretonnes, cantiques et litanies s’élèvent vers le ciel armoricain en même temps que se hissent en des processions colorées bannières, croix, reliques, statues de saints portées par des hommes ou des femmes en costume traditionnel. Les pardons bretons semblent bien constituer une spécificité du folklore local. Mais ils expriment aussi de façon remarquable la foi, la piété et la dévotion du peuple breton envers ses saints protecteurs.

Entre folklore et sacralité

Le Pardon trouve ses origines dans les confréries qui divisaient les paroisses en quartiers : chacune se mettait sous la protection d’un saint et lui portait une dévotion particulière. Les habitants du quartier se devaient aide et assistance au sein de la confrérie : ils se réunissaient une ou deux fois par an pour rétablir leur unité et se donner un pardon mutuel. À partir du XVe siècle, la construction des églises permit les premiers pèlerinages : de grandes assemblées se réunissaient en des messes solennelles et en des processions pour obtenir le pardon des péchés, les indulgences, exécuter un vœu ou encore demander des grâces.
Ces traditions religieuses ancestrales trouvent aujourd’hui un regain grâce au rôle de nombreuses associations. Leur caractère social et identitaire est clairement manifesté, comme le prouve la fête populaire qui les clôt : les danses bretonnes viennent mêler le profane au sacré. Traditions vivantes mêlant folklore et sacralité, les pardons sont donc bien une raçine  pour l’identité bretonne.

1 200 pardons bretons

Ainsi, ce ne sont pas moins de 1 200 pardons qui sont chaque année fêtés en Bretagne.
Tous ne s’équivalent pas cependant : de grands pardons tels que celui de Sainte Anne d’Auray rassemblent des milliers de personnes et touristes, mais la majorité sont des petits pardons pleins de ferveur religieuse. Parmi les plus connus, nous pouvons citer le pardon de Saint-Yves à Tréguier (22) le troisième dimanche de mai, celui de Notre-Dame de Bon-Secours à Guingamp (22) le premier dimanche de juillet, de la Saint-Guénolé à Batz-sur-Mer (44) le premier dimanche d’août ou encore celui de Notre-Dame du Folgoët (29) au Folgoët le premier dimanche de septembre.

Certains pardons s’échelonnent sur tout un territoire. Certains suivent de longs itinéraires appelés « troménies » (tour du territoire du saint, en breton). Ainsi de la « Grande Troménie de Locronan » (deuxième dimanche de juillet) qui, tous les six ans, suit un parcours de 12 kilomètres ponctué de chapelles votives improvisées. Mais le plus connu et celui qui a le plus d’ampleur est bien le Tro-Breiz, « le tour de Bretagne ». Depuis le XIIe siècle, les sept saints fondateurs des évêchés armoricains sont vénérés dans un parcours de plus de 500 kilomètres reliant leurs tombeaux aux sept évêchés : Samson à Dol, Malo à Saint-Malo, Brieuc à Saint Brieuc, Tugdual à Tréguier, Pol-Aurélien à Saint-Pol-de-Léon, Corentin à Quimper et Patern à Vannes.

Le regain de cette tradition a par ailleurs vu l’apparition de nouveaux pardons insolites, fruits de la société contemporaine : le pardon islamo-chrétien au Vieux-Marché (22) le quatrième dimanche de juillet, créé en 1954, symbolisant le rapprochement de l’Islam et de la Chrétienté, ou encore, depuis 1979, le pardon de la Madone des Motards à Porcaro (56) le 15 août, au cours duquell le recteur bénit les motos.