Religions et cultures à l’ère de « Laudato Si' »

Antoine DzamahAux Semaines sociales de France, on a l’art et la manière de saisir les enjeux d’actualité sous le regard intemporel de la Doctrine sociale de l’Eglise. Thème de la Session qui vient de se dérouler du 2 au 4 octobre 2015 à l’Unesco : Religions et cultures, Ressources pour imaginer le monde. Par Estelle Grenon.

Alors que se préparait la Session, l’encyclique Laudato Si’ du pape François sort. Comment s’approprier l’appel lancé à relier les défis pour l’humanité avec les défis pour l’environnement? Tel sera le fil rouge de ces trois jours de formation, de débat et de proposition sur les grands enjeux de société.

L’appel du pape François : tracer la voie d’un destin commun

Dans Laudato Si’, le pape dépasse le moralisme, le sens du devoir, la peur pour parler de joie, de partage. Loin de n’être qu’une parole qui dénonce, elle est une parole qui annonce. Qui annonce qu’un chemin de simplicité, d’émerveillement, de respect et de responsabilité est heureux. Qu’il s’agit de croire que l’on peut changer quelque chose. Que la création de richesse qui se fait au détriment des plus pauvres perd de sa valeur. Qu’avoir conscience des grandeurs et des limites de notre planète ouvre une voie de conversion écologique et spirituelle. Le cardinal Monsengwo a ainsi défini Laudato Si’ comme « une voie vers une juste relation avec Dieu, la Terre et les hommes ».

A deux mois de l’ouverture de la Cop21, sommet mondial pour le climat, la responsabilité collective est ici clairement énoncée : se réconcilier avec le reste de l’humanité, parvenir à renouer une communauté de destin en misant sur le partage et non sur la prédation. Il est question de mettre en avant dans ce haut lieu de la diversité comment les citoyens du monde peuvent contribuer à la préservation de l’humanité et de l’environnement.

Révolte face à l’injustice : les clés d’une mobilisation

Et si l’on se laisse prendre aux tripes de notre relation à l’humanité et à la terre ? Marianne Sébastien: musicienne, cantatrice, thérapeute par la voix et fondatrice de Voix Libres International a interpellé l’auditoire en lançant : « Voir des personnes vivre et mourir dans les ordures ne peut que pousser à l’action, faire comprendre l’homme, l’aimer.» Puis elle le fit en chantant et l’émotion enveloppa l’Unesco.

« L’émerveillement face à la beauté, la conscience de la singularité et la fragilité de la Planète bleue sont le socle de construction d’une politique pour l’humanité » affirme Patrick Viveret, philosophe et essayiste altermondialiste. Et si l’ont repartait de la beauté pour trouver du sens à l’engagement pour la planète.

Notre foi chrétienne ajoute une dimension. Dieu veut agir avec la coopération de l’homme. Aider l’homme, c’est le réveiller à sa responsabilité. Choisir la sobriété face à la démesure, « lutter contre le conservatisme de nos habitudes est une voie de libération ». Et ce fut énoncé par Yannick Jadot, eurodéputé. L’engagement de citoyen chrétien rejoint celui d’Alternatiba qui s’est vécu à travers toute la France comme une démonstration positive qu’on peut vivre autrement.

« Les jeunes générations sont nées avec la conscience des limites de la terre, avec le numérique et le sens du partage» a présenté Gilles Vermont-Desroches, président des Scouts et Guides de France.

Les moteurs d’une conversion écologique et spirituelle

Le premier moteur pour agir est l’opportunité à saisir. « Aujourd’hui c’est le moment opportun pour passer concrètement à un monde nouveau » a souligné Elena Lasida, chargée de mission Ecologie et Société au sein du Service national Famille et Société (SNFS) à la Conférence des évêques de France. Les jours passent et laissent des victimes sur leur passage.

Antoine Dzamah (Photo), président de Sichem, organisation paysanne togolaise a, par exemple, raconté la disparition des baobabs, refuges des abeilles, pour souligner combien l’Afrique payait un lourd tribut au changement climatique, et les plus pauvres en première ligne. Ecouter « ‘tant la clameur des pauvres que la clameur de la terre » comme nous y invite le Pape est une façon de rendre service à Dieu. De faire sa volonté en étant attentif aux plus pauvres.

Les moteurs de l’engagement cités à cette rencontre furent de construire une société vivable et plus équitable. Et n’oublions pas que la rencontre est un moteur de changement aussi, tout comme la soif de libération de ce qui nous enchaîne.

Alors jetez un œil au programme des festivités religieuses qui s’annoncent en vue de la Cop21 : occasion de se mettre en mouvement à plusieurs vers Laudato Si’ dans son quotidien.

Estelle Grenon

Coordinatrice de la Cop 21 pour l’Eglise catholique en France

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