Partir en mission : voyages humanitaires et intérieurs

INIGO_cambodge_jeuLe Service national de la Mission Universelle de l’Eglise (SNMUE) publie une brochure recensant divers camps et voyages animés par un esprit de service missionnaire, organisés par des organismes et des congrégations. Une invitation à l’expérience spirituelle de la rencontre dont témoignent candidats au départ et anciens volontaires avec INIGO et Mad’Action. Par Chantal Joly.

Depuis 10 ans, près de 130 jeunes ont été envoyés individuellement dans des communautés jésuites en Afrique, Asie, Amérique Latine, aux Caraïbes… et désormais en Europe, pour répondre aux urgences de l’actualité (auprès des réfugiés en Grèce). C’est quasiment « une petite entreprise familiale mais surtout un centre de discernement qui fait dans le cousu main », plaisante le Père Vincent Bocher, président d’INIGO France et Belgique, le Service Jésuite du Volontariat International. Parfois, en effet, ce n’est pas le bon moment, pas la bonne demande (une école de la foi s’avérera plus appropriée pour un passionné de théologie); le jeune n’est pas assez solide pour vivre le choc interculturel ou encore sa compétence n’est pas adaptée aux besoins des populations. Or, rappelle le Père Bocher, « il s’agit bien d’un triangle : le volontaire, le partenaire et nous ».

Depuis deux ans, ses partenaires du Sud exprimant des besoins de personnes qualifiées pour des postes à responsabilité, INIGO a ouvert ses séjours à des couples de retraités ou retraités veufs ou célibataires.
C’est le cas de Jacques, un ingénieur en fin de carrière cet été. Ayant développé au fil du temps ses actions de bénévolat (Croix-Rouge, Petits Frères des Pauvres, accueil au sanctuaire de la Salette et au monastère des Clarisses à Assise), ce Grenoblois de 62 ans veut, explique-t-il, « utiliser son temps libre mieux que lorsqu’il était actif professionnellement ». Ayant vécu comme expatrié deux fois 3 ans en Ukraine puis en Chine, il sait qu’il peut « s’adapter à un nouveau pays » sinon à une nouvelle langue. « Motivé religieusement », ouvert à toute mission, parlant anglais et diplômé de secourisme, il espère partir début 2017 pour un an.

Un changement de regard
« La réussite, c’est lorsque la vie de ces jeunes a été touchée par ce qu’ils ont vu au point que cela fasse changer leur rapport à l’autre, à l’étranger et qu’ils découvrent eux-mêmes qui ils sont », commente le Père Bocher; spiritualité ignatienne oblige. Bien sûr, les fruits d’une telle expérience sont variables selon les tempéraments et l’histoire de chacun. Quelques jeunes s’installent dans leur pays de mission, beaucoup gardent « une note sociale » et s’investissent en France, certains aidant à la formation des nouveaux partants. La majorité reprend le cours de ses études ou de sa vie professionnelle mais en intégrant, par exemple, un service export. « Garder un pied dans l’international me plaisait » , explique ainsi Denis Couillaud, éducateur spécialisé, aujourd’hui co-directeur d’INIGO après avoir été responsable, de 2010 à 2012, d’un foyer d’hébergement et coordinateur pédagogique d’un centre d’activités de jour pour enfants dans un centre jésuite au Pérou. « Le monde n’a pas changé mais mon regard oui, sur des tas de notions telles que l’isolement, la prière, la pauvreté, l’enfance et cette part d’humanité que nous avons tous en commun. On revient avec plein de réponses, mais pas forcément aux questions du départ », témoigne Denis.

Dépaysement, utilité et sobriété heureuse madaction
« C’est une aventure humanitaire mais surtout humanisante », commente Anne-Cécile, avec le sens de la formule d’une étudiante en Lettres Modernes. À 17 ans, elle a fait partie des premiers mineurs à s’être rendu au Cameroun en 2013 pour des chantiers solidaires et éducatifs avec l’association Mad’Action.

Les diapositives que Sœur Martine Simon, Sœur de l’Enfant-Jésus, avait projetées dans son lycée à Rouen avaient symbolisé pour elle « dépaysement et utilité ». Anne-Cécile, qui a traversé dans sa vie personnelle des épreuves, raconte y « avoir goûté des petits morceaux de bonheur, comme manger de la canne à sucre sous la pluie ». Leur petite équipe ayant partagé sur place la vie des familles, elle a été touchée par le fait que ces villageois démunis « se sont pliés en quatre pour eux ». Elle a surtout été très émue du geste d’un garçonnet visiblement sous-alimenté qui lui a offert, un jour, la moitié de ses gâteaux. Un apprentissage des inégalités planétaires et de conditions de vie spartiates qui la rend très critique vis-à-vis des exigences de confort de ses camarades de la Sorbonne. Ce voyage l’a aussi amenée à s’engager, sur Paris, en tant que comme bénévole sur une péniche d’accueil des SDF.

Sollicitée par Sœur Martine pour accompagner à Madagascar un groupe de 21 personnes trois semaines cet été en faisant partie du « Conseil des Sages » (6 adultes dont le Père Potel, le curé de la paroisse Notre-Dame de Rouen), Anne-Cécile se réjouit à l’idée de « découvrir une nouvelle culture ». Au programme : peinture dans une école, reconstruction d’un lavoir, animation de jeux avec des enfants, visite d’une léproserie… Croyante en Dieu mais baignée également dans la religion islamique par une branche de sa famille, Anne-Cécile témoigne avoir vécu « avec plaisir » les messes matinales au Cameroun. « En Afrique, dit-elle, Jésus est vivant ». Avec cette nouvelle mission de Mad’Action, elle sait qu’elle « se retrouvera avec des gens qui ont des valeurs ».

Partir. Ailleurs, ici et en soi Partir-2016
La brochure Partir. Pour voyager autrement en 2016 offre une palette de possibilités : des voyages missionnaires, des missions individuelles, l’aventure des JMJ, des contacts pour partir en coopération et des engagements…. en France. Des propositions qui vont de quelques semaines à 2 ans. Aux générations de plus en plus avides de « road trip », le Père Antoine Sontag, directeur du SNMUE rappelle dans son éditorial : « Nous qui croyons faire un voyage à l’étranger, nous nous retrouvons à faire un voyage intérieur ».

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