Retour à Paris pour le cardinal Alencherry de l’Eglise syro-malabare

georges_alencherry_portraitArchevêque majeur de l’Eglise syro-malabare, le cardinal indien Georges Alencherry a rendu visite à sa communauté et à ses anciens paroissiens. Formé à Paris dans les années 80, il évoque, dans la langue de Molière, la culture française qui lui est chère.

Quelles sont les raisons de votre voyage en France ?

J’ai accepté l’invitation des Missions Etrangères de Paris (MEP) à devenir Membre Honoraire ! Je viens rendre visite à ma communauté syro-malabare ici qui compte près de 200 personnes en région parisienne. J’en profite pour revoir les paroissiens de Saint-François-Xavier (Paris 7e) où j’ai travaillé autrefois comme prêtre étudiant. J’ai étudié à l’Institut catholique et à la Sorbonne, de 1981 à 1986. Je logeais à la paroisse où j’animais un groupe de jeunes. Ils ont grandi, travaillent beaucoup mais nous restons en relation. Je voulais renouveler mes contacts avec l’œuvre d’Orient qui soutient notre travail missionnaire en Inde. J’ai sollicité un rendez-vous avec le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris. J’ai également participé à une réception avec Mgr Pascal Gollnisch, Directeur de l’œuvre d’Orient.

Quels projets portez-vous avec l’Oeuvre d’Orient ?

Il y a toujours des petits projets en cours. Mais pour l’avenir, nous avons le projet d’une maison dans laquelle nous pourrions conserver notre patrimoine, celui de l’Eglise syro-malabare, en lien avec notre foi : manuscrits, objets sacrés… Nous sommes les chrétiens de Saint Thomas ! Notre histoire remonte à sa venue, au 1er siècle. Beaucoup de choses doivent être gardées mais il nous manque un centre culturel. Depuis le Concile Vatican II, nous avons la liberté de gouverner notre Eglise, en lien avec le Saint-Siège.

Comment se vit le dialogue avec les autres Eglises et religions en Inde ?

Dans l’Eglise catholique, nous avons trois rites : Eglise syro-malabare, Eglise syro-malankare et Eglise latine. Il existe une conférence épiscopale commune aux trois Eglises particulières. Avec les autres religions chrétiennes, ça marche mieux. Il subsiste quelques problèmes à cause de malentendus de la part de courants intégristes. Le pays est démocratique. La loi garantit le respect des religions. Nous pouvons travailler ensemble pour faire des choses au bénéfice de la société entière. Le dialogue interreligieux va de pair avec des activités interreligieux dans les domaines de l’éducation, la culture, la politique, l’économie… Les religions coopèrent à tous les niveaux. Cela nous donne le sens d’une citoyenneté commune. C’est très important.

Quel regard portez-vous sur la France ?

Les relations sont bonnes entre les deux pays. Tout dernièrement, le Premier ministre était en France. Le Président Hollande est venu en Inde. Au niveau économique et commercial, même militaire, il y a beaucoup de liens. C’est important pour mon Eglise d’être en relation avec le gouvernement français, même si la France est un pays sécularisé. A mon avis, le principe d’une religion par un Etat, c’est fini. Et ce n’est pas la meilleure situation non plus. Il faut respecter toutes les religions, la liberté individuelle et les Droits de l’Homme. Mais ça ne doit pas dire qu’il faille lutter contre la religion ! Je ne dis pas que le gouvernement le fait mais c’est le cas de certaines personnes en France. En Inde aussi, des courants extrémistes voudraient imposer une religion unique. C’est le mal que l’on doit vaincre. Je préfère la « laïcité positive » – pour reprendre l’expression du Président Sarkozy – qui protège les religions, la foi des citoyens, les valeurs chrétiennes qui sont à l’origine de la culture française et occidentale.

Quels souvenirs gardez-vous de vos études à Paris ?

La formation française donne une ouverture à toutes les réalités humaines. Je retiens aussi l’accueil des étrangers. Combien de réfugiés reçus par ce pays ! Pour les études, il y a un niveau d’excellence, de recherche, un désir de découverte des choses pour le bien de l’humanité. Et la beauté de la langue française ! En français, on peut tenir une conversation très distinguée sur beaucoup de choses. Cela élève la pensée. En France, je vois aussi une intégration des cultures du monde.

En Inde, « une réception particulière » pour Laudato Si’, couv_vatican_encyclique_laudato_siencyclique du Pape François sur l’écologie intégrale

« En Inde, la religion hindouiste s’intéresse à l’écologie parce que la foi-même y touche, explique le cardinal Alencherry. Pour les Hindous, Dieu est présent dans la nature, dans tous les êtres vivants : les animaux comme les hommes. Ils protègent la nature d’une manière très spéciale ». Pour nous, catholiques, poursuit-il, « c’est la Création de Dieu que nous devons garder. Pour toutes ces raisons, en Inde, la réception de l’encyclique sera particulière. Nous sommes sensibilisés déjà à l’écologie et aux Droits de l’Homme ».

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