Mgr Dollmann : « Un encouragement aux chrétiens dans les domaines politiques et économiques »

Mgr Vincent DollmannEvêque auxiliaire de Strasbourg, Mgr Vincent Dollmann a assisté au discours du Pape François au Conseil de l’Europe, mardi 25 novembre 2014, lors de sa visite aux institutions européennes. Impressions et analyses.

Comment vous êtes-vous investi dans la préparation de la venue du Pape François ?

Comme évêque auxiliaire, j’ai été très proche de l’archevêque dans les préparatifs. J’ai suivi tous les débats sur le programme de la visite – au Parlement, au Conseil de l’Europe, à la ville de Strasbourg… Ce qui nous paraissait déterminant était de tout faire pour cela se passe au mieux. Qu’à la fois les diocésains et l’ensemble des habitants de Strasbourg et de plus loin puissent vivre cela comme un événement important, avec notamment une proposition de prière dans les communautés chrétiennes. Dès l’annonce de cette visite – et cela m’a beaucoup touché – les autorités civiles, les associations, les communautés chrétiennes mais aussi les autres cultes, ont vibré pour cela.

Vous étiez dans l’hémicycle du Conseil de l’Europe…

Tous les sièges étaient occupés. J’y ai vu une belle diversité. J’étais assis à côté d’une classe originaire d’Allemagne et d’une école publique française, venue avec son professeur de religion – comme le prévoit le statut concordataire de l’Alsace. Cela nous a permis de vivre quelque chose de l’écclésialité, même au-delà de nos frontières.

Comment les chrétiens se sont-ils mobilisés pour accueillir le Pape ?

Malgré l’insistance sur le fait que ce soit une visite aux institutions européennes, une centaine de chrétiens étaient à l’aéroport pour l’accueillir par des chants. Quelques centaines de personnes aux abords des institutions européennes ont contribué à une ambiance chaleureuse et bon-enfant. Ce qui était très beau aussi, c’était de voir plusieurs centaines de fidèles et de touristes à la cathédrale de Strasbourg écouter les discours retransmis sur grand écran.

Quelles paroles du Pape souhaitez-vous souligner ?

Il y aurait beaucoup de choses. C’est très riche ! Au fond, pour moi, son discours était un cas d’école, un modèle pour nous. Je pense à trois niveaux. D’abord, un encouragement pour tout baptisé à se rappeler qu’aucun domaine de la vie de l’homme ne peut être étranger à la foi, au nom de ce que nous allons fêter dans quelques semaines, la naissance du Christ, le Fils de Dieu qui s’est fait chair. Il a quand même balayé les domaines anthropologiques, économiques et politiques.

Ensuite, son discours s’adresse également à tous nos penseurs, à nos décideurs chrétiens qui sont préoccupés par la dimension chrétienne de leur travail. Il y a un appel très fort à vraiment faire en sorte que la foi ait toute sa place dans la réflexion, dans les discours. Le Pape nous a montré combien la foi, l’attachement au Christ, peut féconder la raison et la réflexion. La raison peut gagner en hauteur et en profondeur. Notre épiscopat français aujourd’hui partage ce souci : il nous faut encourager toutes les personnes chrétiennes, dans les domaines politiques et économiques, à oser y aller avec leur foi. Ce serait un vrai service à rendre.

Troisième point, pour moi fondamental, et qui renvoie à toute personne de bonne volonté, c’est que tous nos messages, tous nos engagements, se fassent dans le respect sans faille des personnes. Je pense, par exemple, à ce qui s’est passé à la cathédrale de Strasbourg, la veille de l’arrivée du Pape François. Un membre du groupe des Femen est monté sur l’autel. Cela a beaucoup blessé le cœur des chrétiens. On a utilisé l’élément le plus central, l’autel, symbole du Christ, pour des revendications qui n’ont pas leur place à ce niveau-là. Moi-même j’ai été très blessé par les images. Comme chrétiens, nous avons à réagir mais dans le respect. Ce matin, avec l’archevêque de Strasbourg, Mgr Jean-Pierre Grallet, nous avons cherché comment dire que nous ne nous opposons pas à l’expression libre de toutes les opinions, mais que cela ne peut pas se faire sans un respect des uns et des autres. Comme communauté catholique, nous avons droit à un minimum de respect.

En écho au Synode sur la famille

Mgr Dollmann souligne encore que le Pape a rappelé en introduction de ses deux discours que nous devions sortir de notre attitude « euro-centrée ». « Le monde aujourd’hui, et l’Europe en premier, doit pouvoir vivre dans la multipolarité, explicite-t-il. C’est certainement une clé dans ce qui se passe autour du Synode sur la famille. La première étape du Synode a permis les expressions très multiples, selon la diversité des traditions. Je crois que l’Eglise n’a pas à avoir peur ».

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