« Fidei Donum », ces prêtres venus d’ailleurs

Par Chantal Joly

Tout l’été, de nombreux prêtres étrangers assurent des remplacements dans les paroisses françaises. Le Documents Episcopat « Fidei Donum en France. Un paysage nouveau » décrypte cette réalité et appelle à une meilleure réciprocité accueillants-accueillis.

« C’est la première fois qu’un texte aussi long paraît sur ce sujet. Jusqu’à présent, il ne s’agissait que d’articles », déclare d’emblée le Père Pierre-Yves Pecqueux, directeur du Service national de la Mission universelle de l’Eglise qui comprend notamment la « Cellule Accueil » des prêtres, religieux, religieuses étrangers en service pastoral en France. Les chiffres donnés en première partie du document justifient cette publication : à la date du 2 avril 2010, on comptait 1472 prêtres insérés dans les différents diocèses de France : 793 d’Afrique, 222 d’Asie, 37 du Moyen-Orient, 104 d’Amérique Latine et tout de même 316 d’Europe. Quant aux religieuses elles étaient 5000. Non seulement cette présence a pris de l’ampleur mais, mondialisation oblige, elle s’installe durablement dans le paysage.

A tel point que du 10 au 14 novembre 2010, une rencontre Europe-Afrique sera exclusivement consacrée à ces échanges de personnels pastoraux et que le jeudi 9 décembre 2010, une rencontre des vicaires généraux abordera également cette question. « Ce qui apparaît clairement, commente le Père Pecqueux, c’est que nous passons d’une pratique du cas par cas à une pratique Fidei Donum dans un véritable échange du type « donner-recevoir ». Nous avons des expériences à nous partager. Ces personnes ont certes une vie d’Eglise à nous apporter mais nous également. Notre accueil respectueux doit leur permettre d’entrer dans la compréhension de notre société, de notre culture, de notre laïcité, de notre rapport au sacré, de notre Eglise où les laïcs ont des responsabilités, etc. Toutes ces mutations appellent, bien sûr, une analyse, un accompagnement, une vigilance ».
 

Un partenariat d’Eglise

Le document aborde, par exemple, des éléments de vie pratique tels que le « grand décalage » entre le niveau de vie dans une communauté même pauvre en France et les moyens économiques dans le pays d’origine ou encore le fait que les prêtres africains ne sont pas habitués à manger et à vivre seuls. Que des prêtres étrangers puissent se retrouver solitaires les jours de fête reste, pour le Père Pecqueux, l’une des réalités les plus douloureuses. Il suggère que chaque communauté chrétienne confie à certains de ses membres le soin d’être attentif à cette convivialité, « sans pour autant instituer un parrainage ou un tutorat ». Le document insiste sur ce point : « Pour le diocèse qui envoie et celui qui accueille, bien prendre conscience qu’il s’agit d’un partenariat d’Eglise locale à Eglise locale, et non pas une affaire de personne à personne ». Le Père Pecqueux ajoute: « Ces personnes ne viennent pas que uniquement pour rendre un service et nous ne cherchons pas que des célébrants. Nous avons tous intérêt à vivre une qualité relationnelle qui ouvre à la réciprocité ».
 

Un même élan missionnaire

Dans des termes clairs, le texte publié par le secrétariat général de la Conférence des évêques de France invite à une conversion des mentalités : « Il nous appartient de dépasser les clivages inscrits culturellement dans nos mémoires et sortir d’un schéma simpliste qui verrait que dans leur venue en France, ce serait encore nous qui rendrions service » et plus loin : « Nous pourrons alors devenir ensemble, en frères et sœurs, acteurs de la mission de partout à partout ».

L’heure est, en effet, à l’internationalité. « L’accueil que nous voulons proposer est bien autre chose qu’une simple réponse à des besoins fonctionnels. Il procède d’une conception de la pastorale qui considère l’évangélisation dans sa dimension universelle et la met en œuvre dans la réciprocité », écrit encore le Père Pecqueux dans son introduction. L’aventure du ministère presbytéral peut trouver du souffle autant à travers le témoignage de ces « pasteurs à part entière » (dixit le Synode des Evêques pour l’Afrique, en octobre 2009) qu’à travers leurs collègues du presbyterium, comme des Français qui continuent de se mettre à disposition des Eglises-sœurs des différents continents. Car même pauvre en personnel pastoral, notre Eglise continue d’être généreuse en missionnaires. Le document précise que « la proportion de prêtres français actuellement à l’extérieur… est sensiblement le même qu’après l’appel de Pie XII en 1957 dans l’encyclique Fidei donum ». Pas question donc de cesser d’appeler pour les vocations sous prétexte de ces « renforts » possibles. Chaque baptisé est appelé à servir lui aussi cet élan « dans la vérité et la réciprocité » par sa prière et des gestes fraternels, et sans hésiter à se former.
 

« Fidei Donum en France. Un paysage nouveau »

Le document de 30 pages comporte quatre témoignages, celui d’une religieuse malgache en mission en France, celui d’un prêtre accueillant du diocèse de Créteil, celui d’un prêtre congolais qui a été curé dans le diocèse de Chartres et le regard de l’Evêque de ce diocèse, Mgr Michel Pansard.

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